Les fusillés de 14-18 liés à l'hommage national

Publié le par ARAC Essonne

11 novembre 1918 . Nicolas Sarkozy a salué la mémoire « de tous les morts sans exception » hier à Douaumont (Meuse) lors du 90e anniversaire de l’armistice.

Sur les pas de Lionel Jospin, qui avait estimé en novem- bre 1998, sous la réprobation de la droite, que les mutins de 14-18 devaient « réintégrer aujourd’hui, pleinement, notre mémoire collective nationale », Nicolas Sarkozy a tenu hier à rendre hommage aux poilus soulignant la nécessité « d’honorer tous les morts, sans exception ». « Je veux dire au nom de notre nation que beaucoup de ceux qui furent exécutés alors ne s’étaient pas déshonorés, n’avaient pas été des lâches, mais que simplement ils étaient allés jusqu’à l’extrême limite de leurs forces », a déclaré le chef de l’État lors des célébrations de la Grande Guerre à Douaumont dans la Meuse. Réhabilitant ainsi, quatre-vingt-dix ans après, les 675 soldats portant l’uniforme français, dont 620 furent fusillés pour mutinerie ou désertion. Peut-être, les paroles réconciliatrices du président de la République avaient également pour ambition de calmer la polémique, bien plus récente, que le rapport Kaspi sur les commémorations publiques venait de déclencher.

Polémique autour du rapport Kaspi

« Je déteste la repentance qui veut nous interdire d’être fiers d’être français… » Les mots choisis par le candidat Sarkozy, à Lyon, le 5 avril 2007, semblaient alors donner le ton des conclusions attendues du rapport de la commission « sur l’avenir et la modernisation des commémorations publiques » présidée par l’historien André Kaspi. Le texte préconise en effet de ne conserver officiellement que trois dates, dont aucune ne fait ombrage à la mémoire nationale : le 8 mai, le 11 novembre et le 14 juillet. Renvoyant à des commémorations « réduites, plus locales ou limitées » les autres rendez-vous mémoriels. La Journée nationale des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français ou encore la Journée des mémoires de la traite de l’esclavage héritant, de fait, d’un statut minoré. « Il n’est pas sain qu’en l’espace d’un demi-siècle, le nombre de commémorations ait doublé », argumente le rapport Kaspi, dont l’auteur avait déclaré le 10 juin dernier lors d’une audition à l’Assemblée nationale « peut-être la solution consisterait-elle à trouver une date pour commémorer tous les morts des guerres passées, présentes et malheureusement futures… ». De quoi laisser perplexe.

supprimer les commémorations

Avant même sa publication officielle, les conclusions du rapport ont, en tout cas, provoqué de vives réactions : cette suppression de commémorations pourrait déclencher « une concurrence des mémoires indigne », a estimé Patrick Lozès, président du Conseil représentatif des associations noires (CRAN). Crainte relayée par le Mouvement contre le racisme et l’amitié entre les peuples (MRAP) qui réprouve également fermement les recommandations de la commission.

Devant le tollé soulevé, Jean François Copé s’est empressé d’ajouter sa voix au désaccord, exprimant son hostilité « totale » à la suppression d’un quelconque de ces rendez-vous nationaux. Les déclarations du patron des députés UMP trouveront d’ailleurs écho chez Jean-Marie Bockel : « Autant je suis contre l’inflation mémorielle, autant je suis contre la remise en cause de commémorations existantes, qu’elles soient nationales ou autres », a ainsi lancé le secrétaire d’État aux Anciens Combattants. Mais le fait que le porte-parole de l’UMP, Frédéric Lefevbre, fidèle parmi les fidèles de Nicolas Sarkozy, plaide lui aussi pour le « statu quo » sur cette question augure une probable remise au placard du texte par l’Élysée, peu enclin à ouvrir un nouveau front de contestation en pleine crise.

Frédéric Durand

Publié dans Mémoire

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